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Le risque d’incendies s’étend à de nouvelles zones

En 2022 après l'incendie des monts d'Arrée en Bretagne, un tracteur arrose le sol calciné avec une citerne.

Le changement climatique va amener les agriculteurs à jouer un rôle actif dans la lutte contre les incendies dans de nouvelles régions jusqu’ici épargnées.

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Le risque d’incendies en France va augmenter avec le changement climatique. Les projections météorologiques de Météo-France, réactualisées en 2023, pronostiquent un assèchement des sols et de la végétation ainsi qu’une baisse de la pluviométrie durant les saisons propices aux incendies. « Vers 2055, les zones très sensibles au feu représenteraient autour de 30 % de la surface totale de la végétation à l’échelle nationale et, en fin de siècle, elles pourraient atteindre 40 % », peut-on lire dans le compte rendu d’une mission commune aux bureaux d’études des ministères de l’Agriculture, de l’Environnement et de l’Intérieur.

Le risque d’incendies en France va augmenter avec le changement climatique, et s'étendre à de nouvelles zones. (© La France Agricole)

Le problème d’une telle extension est qu’on ne pourra pas la gérer avec la même densité de canadairs ou de pompiers que dans les landes de Gascogne ou le littoral méditerranéen, zones historiques des incendies. Au contraire, l’action publique cherche à prendre un temps d’avance sur la progression du risque. Le rapport interministériel distingue trois zones pour répartir les moyens de lutte contre le feu :

Accès à l’eau et défrichement

Le Lot fait partie de ces extensions. Le département en a pris conscience après deux vastes incendies : à Cabrerets en 1989 et à Foncave en 1998. Dans les années 1990, les éleveurs d’ovins des vallées du Lot et du Célé ont réussi à mettre dans le débat public l’intérêt général de la valorisation pastorale des espaces abandonnés. « L’aménagement du territoire par les agriculteurs a plusieurs avantages. Il évite l’embroussaillement. Il lutte contre les nuisibles animaux ou végétaux. Il permet de multiplier les accès à l’eau pour les pompiers dans des endroits reculés », explique Laurent Mago, le directeur de la chambre d’agriculture du Lot. La participation des agriculteurs à la prévention des incendies y prend deux formes : l’accès à l’eau et le défrichement de vastes étendues.

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Parmi les 42 associations syndicales autorisées d’irrigation (Asa) du département, sept, et bientôt dix, ont signé un partenariat avec le service départemental de secours (Sdis 46) pour mettre à la disposition des pompiers son réseau d’irrigation et ses retenues collinaires. Des panneaux et des points sur les cartes indiquent aux pompiers qu’ils peuvent se brancher sur les vannes. Cette collaboration apporte, d’une part, de la finesse dans le maillage territorial au profit des hameaux ou des habitations isolées et, d’autre part, un débit d’eau suffisant pour les secours alors que celui des réseaux d’eau potable est souvent insuffisant.

Le défrichement, lui, est organisé autour de 22 associations foncières pastorales pour l’instant. Deux autres sont en cours de création. Elles ont pour fonction de mettre en pâture deux mille hectares par une cinquantaine d’éleveurs professionnels locaux. S’y ajoute une association d’éleveurs, Transhumance en Quercy, qui placent leurs ovins et bovins sous la conduite d’un berger commun. « Un plan de gestion vient concrètement répartir quels animaux peuvent passer où et quand. On écrit un mode de conduite (date, nombre d’animaux, critère de sortie…) pour chaque parc avec un protocole sanitaire précis. Il est validé par la collectivité des éleveurs », explique Philippe Tyssandier, conseiller en pastoralisme à la chambre d’agriculture du Lot, chargé d’élaborer ce plan de gestion.

Paiement pour services environnementaux

Reste à faire reconnaître financièrement ce service. Cité en exemple par le rapport interministériel, le Lot explore la piste des paiements pour services environnementaux. Inscrite dans le projet environnemental de la filière ovine, cette idée viendrait reconnaître, au-delà de l’aide publique (MAEC…), le rôle des éleveurs dans le maintien de la biodiversité et la lutte contre les incendies. La filière est en train de rédiger, avec l’aide d’Epiterre, marque de services commune à la FNSEA et au réseau Adasea, des contrats types destinés aux entreprises pour qu’elles financent les agriculteurs. Elles valoriseraient à leur tour cette action de prévention dans leur rapport RSE obligatoire (responsabilité sociale et environnementale).

Enfin, la collaboration entre les agriculteurs et les pompiers bute sur des problèmes très pratiques au moment de l’urgence. Olivier Ribouleau, chef de cultures à Vert (Landes), en témoigne. En juillet 2022, un midi, un feu démarre à 500 mètres de la ferme. L’extincteur, le pulvérisateur… c’est trop tard : en une heure, trente hectares avaient déjà brûlé. Une dizaine d’années plus tôt, à la demande du président du Sdis 40, il avait préparé l’accès des pompiers à ses pompes d’irrigation. Dans les faits, c’est le facteur humain qui a retardé la mécanique. Les nouveaux points de prélèvement n’avaient pas été validés sur les cartes des pompiers. L’autorisation de pompage n’est pas formelle. Bref, ils hésitent, même si, au bout d’un moment, l’avancée des flammes pousse à l’action. Il n’y a eu « que » 50 hectares de brûlés sur la ferme. « C’est une chaîne à plusieurs maillons qui est mise en œuvre dans l’urgence. La situation a fait apparaître la nécessité de préparer les choses », raconte Olivier Ribouleau. Depuis, les cartes sont à jour et les autorisations ont été signées.

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